Rester positive, le défi du siècle

 

Je vis une de ces journées. 
Ce matin j’ai peiné à me lever. Ce matin c’est mon fils qui, en se réveillant a cette nouvelle habitude, merveilleuse soit dit en passant de scander « maman » de façon répétée jusqu’à ce que je me présente devant lui, m’a tiré du lit.

J’en suis donc sortie, telle une automate pour voir son visage s’éclairer lorsque j’ai franchi la porte et cela n’a pas manqué j’ai eu ce coup au cœur suivi d’une indicible fierté lorsqu’il a tendu les bras vers moi. 
Je lui ai changé sa couche, puis après un bref échange de mots incompréhensibles (il a à peine 2 ans ) je l’ai emmené dans notre lit et nous nous sommes recouchés. Deux heures plus tard, son père a pris le relais, c’est pourquoi en me levant pour la seconde fois aujourd’hui, mon fils était déjà parti chez sa nounou. 

Donc pas de diversion possible. Personne a qui donné le bain, faire un biberon, personne qui me pousserait à franchir la porte ce matin. Toutes les autres techniques de diversion n’ont pas marché non plus. J’ai lu des articles de blogueurs auxquels je suis abonnée, lu des nouvelles, regardé un épisode de série, rien n’y a fait, je me retrouve au même point que ce matin: je n’ai pas envie de sortir du lit, à quoi cela me servirait? Je suis dans une impasse, je n’avance plus depuis un certain temps dans ma vie.

Voilà où j’en suis, à presque 30 ans avec un diplôme supérieur dont je ne veux pas me servir et une foule de questionnements dont je n’obtiens que des réponses partielles. 
Le mot lutte résume parfaitement ce que je vis depuis deux ans déjà. Après le diplôme, le travail. Du moins c’est de cette manière que j’ai cru que cela se passerait pour moi. En bonne élève et en bonne fille que j’étais, l’obtention d’un diplôme qui plus est supérieur devait m’ouvrir les portes de la grande vie. Tout était prévu, je décrochais mon diplôme, tombais enceinte, me mariais dans la foulée puis je trouvais un travail après m’être occupée quelques mois de mon enfant.

Ce plan minutieusement mis en place a été réalisé en grande partie sauf qu’à un an d’être diplômée, j’entrais en crise: ce que je faisais depuis 4 ans n’était pas ce que je voulais faire pour les 40 prochaines années. Cette évidence sonnais le glas du début des problèmes. Terminer mon M1 a été un véritable enfer et j’ai passé mon M2 dans une sorte de brouillard. Heureusement que j’ai épousé un homme d’action, pragmatique dont le réflexe est de trouver tout de suite une solution lorsqu’un problème se présente. Il m’a aidé a tenir la tête hors de l’eau quelques temps mais nous n’avons fait que retarder l’échéance.
Je n’ai jamais su me mentir à moi même. Cela m’a évité de nombreux soucis dans ma vie tout en me faisant passer de très désagréables moments. Or cette crise je ne la prendrai pas immédiatement au sérieux, je mettrai en place des raisonnements pour la minimiser, la poussant à prendre des proportions qui me dépasseront. Je réaliserai plus tard qu’il me faudrait totalement me laisser immerger, plonger dans cette crise existentielle afin de la laisser suivre son cours, bien entendu en évitant scrupuleusement de me noyer.
C’est pourquoi 4 ans plus tard j’en vis encore les répercussions et j’ai la nette impression de faire du surplace. Je nage encore et encore, j’en ai des crampes aux jambes, mes bras sont lourds mais je n’avance pas d’un iota depuis quelques temps.
Je n’ai su que très tard su ce que je voulais faire de ma vie (tard par rapport à qui? Je me demande…), je finissais à peine mon diplôme que cette évidence s’imposait à moi et bien entendu cela n’a strictement rien à voir avec ce que j’ai mis plus de 5 ans à bâtir. Je dois donc faire le deuil de cet ancien moi que j’aimais plutôt pas mal et investir un champ totalement inconnu: bref c’est galère et flippant.
Certes j’ai avancé depuis, affronté de nombreux démons mais je dois me rendre à l’évidence le chemin à parcourir est encore long et à cet instant T, je suis épuisée. Prendre le temps de se déconstruire n’est pas une mince affaire. Je remets en cause mes certitudes, réactions, mes réflexes, mes systèmes de pensées d’une part et de l’autre je me nourris de mes lectures et travaille à ma croissance spirituelle. La majeure partie de ce système s’auto-entretien et s’alimente mais il y a des jours où des grains de sable se glissent dans les rouages de ma mécanique et l’alourdissent.
Je vis donc une de ces journées où je suis sous la couette. Après avoir tenté de lire, seconde activité qui me maintien en vie, je me tourne vers la première qui est l’écriture. Comme toujours, même si écrire ne m’apporte pas de réponses, cela m’aide à remettre mes idées dans l’ordre et me permet de mettre mes idées en perspective. 
Durant ces dernières années, des phases de procrastination associées à de mémorables moments de panique, ponctuent ce que je pensais jusqu’à présent être la recherche de ce que je serai professionnellement. Or je dois me rendre à l’évidence que ce je cherche depuis quelques années maintenant c’est moi-même, c’est mon projet de vie. Du coup en ce moment je vis un de ces moments de panique en rédigeant ce texte. 
De nombreuses questions me taraudent. Quand est ce que j’aurai un vrai métier? Quand est ce que je pourrai subvenir durablement aux besoins de ma famille? J’ai peur de ne pas être un bon exemple pour mon fils, d’être le genre de mère qui abandonne ses rêves parce qu’ils lui paraissent irréalisables. Je crains de me laisser dévorer par la peur et mes questionnements, que la réalité me rattrape. Mais surtout j’ai peur d’être incapable d’identifier le chaînon manquant qui m’empêche de faire passer mes rêves à la réalité.
Voilà ce qui m’a empêché de me lever ce matin, voilà ce qui a obscurci mon horizon.
La maternité ma apporté son lot de joies, de bonheur qui réside dans des choses que je trouvais insignifiantes, mais aussi son lot de craintes, d’obsessions. Une chose revient souvent dans mes questionnements concernant mon fils: qu’est ce que j’aimerais lui transmettre? La seule réponse valable, la seule chose qui me semble pérenne à cet instant de ma vie est que je voudrais l’aider à se construire afin qu’il acquiert la capacité à réaliser ses rêves. 
Je pense que c’est cet apprentissage que je fais depuis ces quatre dernières années. Il est long, difficile et complexe, d’autant plus que dans le processus j’apprends aussi à me connaître. Le challenge est de rester positive durant cette aventure.
Je vis donc une de ces journées mais va falloir sortir du lit car je dois récupérer mon fils et réfléchir à ce que nous allons manger ce soir.

Ally K.

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